Appuyez sur Entrée pour voir vos résultats ou Echap pour annuler.

Le règlement Transparence en pratique : comment accéder aux documents non publiés de l’Union européenne
Et une bibliographie pour aller plus loin

[billet initialement publié en juillet 2011 et mis à jour depuis]

Vous cherchez un document européen cité par un article ou dont vous avez entendu parler. Vous ne le trouvez pas en ligne sur les sites web des institutions et organismes de l’Union européenne. Ou bien vous savez où le trouver mais on refuse de vous le communiquer.

Vous en avez absolument besoin. Comment l’obtenir ? Est ce seulement possible ? Et dans quel délai ?

C’est l’objet du règlement européen n° 1049/2001 du 30 mai 2001 relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission, dit règlement "Transparence" [1].

Sommaire

  • Le règlement Transparence en pratique
  • Le règlement Transparence en détail et commenté
  • Pour aller plus loin - Bibliographie

Le règlement Transparence en pratique

En simplifiant, on peut résumer ainsi les règles européennes d’accès aux documents :

  • délais de réponse de l’administration européenne : elle a 15 jours pour répondre + 15 jours supplémentaires en cas de refus opposé à la demande initiale suivi d’une réitération de la demande
  • n’ayez aucun espoir d’obtenir ainsi des secrets militaires ou d’affaires ni des avants-projets de décisions
  • principe de gratuité.

En pratique, ce droit d’accès :

  • s’exerce aujourd’hui essentiellement à travers les registres de documents : la rubrique Transparence du site de la Commission européen propose une liste de ces registres sur sa page Comment accéder aux documents de la Commission. Il faut commencer par vérifier sur ces registres
  • si vous n’y trouvez pas le document recherché :
    • remplissez le formulaire en ligne Demande de documents [2]. Si c’est confus ou très compliqué, adressez vous au service Europe Direct (je ne recommande pas car par téléphone, ils vous renverront vers le formulaire supra et leur autre formulaire est moins détaillé mais aussi moins précis que le précédent)
    • mieux vaut être patient : les délais de réponse constatés sont tous supérieurs à deux semaines. En clair, les services de la Commission, l’organisme le plus souvent contacté pour les demandes d’accès, prennent systématiquement au moins le délai initial de 15 jours que leur octroie le règlement. En cas de difficulté pour les services de la Commission [3], un délai de quatre à cinq semaines est courant. Il ne faut donc pas s’impatienter aussitôt le délai d’un mois (15 jours + 15 jours) dépassé : sauf refus, le document devrait alors bientôt arriver.

Liste des exceptions au droit d’accès :

  • inscrites dans le règlement :
    • atteinte à la protection de l’intérêt public. Autrement dit : la sécurité publique, la défense et les affaires militaires, les relations internationales et la politique financière, monétaire ou économique de la Communauté ou d’un Etat membre
    • atteinte à la vie privée et de l’intégrité de l’individu, notamment en relation avec la protection des données personnelles (RGPD)
    • secrets d’affaires et atteinte à la propriété intellectuelle
  • de plus, selon la jurisprudence des juridictions de l’Union européenne, une présomption générale de non-divulgation s’applique aux documents concernant, notamment :
    • les procédures d’infration en cours
    • les affaires d’aides d’Etat
    • les affaires de concurrence et les documents transmis par des autorités nationales de la concurrence
    • les affaires de concentrations ("mergers")
    • les enquêtes pour fraude (OLAF)
    • les affaires portées devant les tribunaux
    • les offres déposées par d’autres soumissionnaires dans une procédure de passation de marché
    • les propositions de subventions soumises par d’autres candidats
    • les questions écrites posées dans le cadre de procédures de sélection du personnel.

Pour plus de précisions, les règles du régime d’accès aux documents des institutions exécutives et législatives communautaires — du moins les plus importantes pour un juriste ou un documentaliste : celles contenues dans le règlement 1049/2001 "Accès aux documents", plus communément appelé "règlement Transparence" (version bilingue FR-EN) — sont reproduites et commentées infra (articles 2 à 10 du règlement). Les points les plus importants de ces articles sont en gras et mes commentaires sont entre crochets.

Le règlement Transparence en détail et commenté

Article 2 Bénéficiaires et champ d’application

1. Tout citoyen de l’Union et toute personne physique ou morale résidant ou ayant son siège dans un État membre a un droit d’accès aux documents des institutions, sous réserve des principes, conditions et limites définis par le présent règlement [4].

[ Une décision du Médiateur européen [5] a établi qu’une institution, un organe, un bureau ou une agence européen est en droit de demander des coordonnées dans le but de traiter une demande d’accès, y compris pour vérifier si la personne demandant l’accès à des documents est un résident ou un citoyen de l’UE. Cependant, de nombreuses institutions, organes, bureaux ou agences ne font pas usage de cette option et acceptent les demandes de toute personne. ]

2. [...]

3. Le présent règlement s’applique à tous les documents détenus par une institution, c’est-à-dire établis ou reçus par elle et en sa possession [...].

[ Que se passe-t-il si une institution insiste sur le fait qu’un document demandé n’existe pas ou n’est plus en sa possession ?
Selon le guide détaillé publié en 2022 par le Médiateur européen (voir bibliographie infra), le droit d’accès aux documents ne s’applique qu’aux documents qui existent et sont en possession d’une institution.
Selon la jurisprudence de l’UE [6], si une institution déclare qu’un document n’existe pas, cette déclaration est présumée vraie. Toutefois, le demandeur peut chercher à renverser cette présomption, par exemple en soulignant qu’une procédure particulière implique normalement la création de ce type de document.
Une institution, un organe, un office ou une agence de l’UE n’est pas obligé de conserver indéfiniment des copies de documents. Il peut arriver qu’un document ait été un jour en possession d’une institution et qu’il ait été supprimé dans le cadre d’une politique normale de conservation des documents. Cependant, il est de bonne pratique administrative de conserver des copies de documents importants, au moins pour une période raisonnable. Le Médiateur a constaté qu’une institution ne devrait pas détruire de documents pendant qu’une demande d’accès à ces documents est en cours de traitement [7].
Une bonne pratique administrative pour une institution, un organe, un office ou une agence de l’UE est de rendre publique sa politique de conservation des documents, comme l’a suggéré le Médiateur [8]. ]

4. [...] les documents sont rendus accessibles au public soit à la suite d’une demande écrite, soit directement sous forme électronique ou par l’intermédiaire d’un registre [ sous-entendu : si le document demandé est publié dans une base de données ou un registre, l’institution n’est pas obligée de vous le communiquer elle-même, c’est à vous d’aller le chercher en ligne ].

Article 3 Définitions

Aux fins du présent règlement, on entend par :
a) "document" : tout contenu quel que soit son support (écrit sur support papier ou stocké sous forme électronique, enregistrement sonore, visuel ou audiovisuel) concernant une matière relative aux politiques, activités et décisions relevant de la compétence de l’institution ;
b) "tiers" : toute personne physique ou morale ou entité extérieure à l’institution concernée, y inclus les États membres, les autres institutions et organes communautaires ou non communautaires, et les pays tiers.

[ Selon le guide détaillé publié en 2022 par le Médiateur européen, la notion de "document" au sens du règlement Transparence est large.
« Elle couvre tout contenu (mots, chiffres, symboles, code informatique, images et, selon la jurisprudence de l’UE, sons) et, selon la jurisprudence de l’UE, dans tout format (documents papier ou électroniques ou enregistrements sonores, visuels ou audiovisuels). Le Médiateur a considéré [9] que le terme "document" fait également référence à des textes ou des messages instantanés concernant des activités professionnelles.
Le Médiateur a estimé [10] que le droit d’accès du public aux documents couvre également le contenu d’une base de données, à condition que le contenu puisse être extrait de la base de données en utilisant les solutions logicielles existantes disponibles pour les personnes utilisant la base de données (c’est-à-dire les utilisateurs finaux). Toutefois, si le contenu ne peut être extrait de la base de données qu’avec l’aide substantielle d’un personnel informatique spécialisé ou au moyen d’outils informatiques spécialisés qui ne sont normalement pas à la disposition des utilisateurs finaux de la base de données, ce contenu n’est pas couvert par le droit d’accès du public aux documents, selon la jurisprudence de l’UE (TUE 3e ch. 26 octobre 2011 T-436/09).
Cependant, le Médiateur a encouragé [11] les institutions de l’UE à examiner et évaluer les solutions techniques possibles, afin d’être en mesure de fournir au public des versions téléchargeables d’une base de données dans le futur. » ]

Article 4 Exceptions

1. Les institutions refusent l’accès à un document dans le cas où la divulgation porterait atteinte à la protection :
a) de l’intérêt public, en ce qui concerne :
- la sécurité publique,
- la défense et les affaires militaires,
- les relations internationales,
- la politique financière, monétaire ou économique de la Communauté ou d’un État membre ; [ Il y a tout de même des limites à cette exception : selon le Tribunal de première instance de l’Union européenne (TPUE), aucune présomption générale de non divulgation ne saurait être admise pour les documents législatifs (travaux parlementaires). L’atteinte au processus décisionnel doit être prouvé « de façon raisonnablement prévisible et non purement hypothétique » et la circonstance que les documents demandés se rapportent au domaine de la coopération policière ne saurait suffire pour démontrer leur caractère particulièrement sensible [12]. ]
b) de la vie privée et de l’intégrité de l’individu, notamment en conformité avec la législation communautaire relative à la protection des données à caractère personnel.

2. Les institutions refusent l’accès à un document dans le cas où sa divulgation porterait atteinte à la protection :

  • des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée, y compris en ce qui concerne la propriété intellectuelle [ les secrets d’affaires ne sont donc pas en danger ]
  • des procédures juridictionnelles et des avis juridiques. [ Un exemple est donné par Michèle sur la liste Juriconnexion : dans sa décision du 12 septembre 2007 dans l’affaire T-36/04 Association de la presse internationale c/ Commission des CE (communiqué de presse n° 60/07), le Tribunal de première instance refuse à l’API l’accès à des documents que la Commission avait présenté au TPI et à la CJCE dans plusieurs procédures dont une concernant le rachat d’Honeywell par General Electric, parce que l’affaire n’avait pas encore été jugée [13]. En sens inverse, l’arrêt CJUE 21 juillet 2011, aff. C-506/08 P, Suède c/ MyTravel et al. montre que dans le cadre d’une procédure de concentration déjà clôturée, pour justifier son refus d’accès, la Commission doit exposer les raisons spécifiques permettant de conclure que leur divulgation aurait porté gravement atteinte au processus décisionnel de l’institution et à la protection des avis juridiques. A défaut, sa décision de refus est annulée. ]
  • des objectifs des activités d’inspection, d’enquête et d’audit, à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie la divulgation du document visé.

3. L’accès à un document établi par une institution pour son usage interne ou reçu par une institution et qui a trait à une question sur laquelle celle-ci n’a pas encore pris de décision est refusé dans le cas où sa divulgation porterait gravement atteinte au processus décisionnel de cette institution, à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie la divulgation du document visé.
L’accès à un document contenant des avis destinés à l’utilisation interne dans le cadre de délibérations et de consultations préliminaires au sein de l’institution concernée est refusé même après que la décision a été prise, dans le cas où la divulgation du document porterait gravement atteinte au processus décisionnel de l’institution, à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie la divulgation du document visé.

4. Dans le cas de documents de tiers, l’institution consulte le tiers afin de déterminer si une exception prévue au paragraphe 1 ou 2 est d’application, à moins qu’il ne soit clair que le document doit ou ne doit pas être divulgué.

5. Un État membre peut demander à une institution de ne pas divulguer un document émanant de cet État sans l’accord préalable de celui-ci.

6. Si une partie seulement du document demandé est concernée par une ou plusieurs des exceptions susvisées, les autres parties du document sont divulguées.

Article 6 Demandes d’accès

1. Les demandes d’accès aux documents sont formulées sous forme écrite, y compris par des moyens électroniques, dans l’une des langues énumérées à l’article 314 du traité CE et de façon suffisamment précise pour permettre à l’institution d’identifier le document. Le demandeur n’est pas obligé de justifier sa demande.

2. Si une demande n’est pas suffisamment précise, l’institution invite le demandeur à la clarifier et assiste celui-ci à cette fin, par exemple en lui donnant des informations sur l’utilisation des registres publics de documents.

3. En cas de demande portant sur un document très long ou sur un très grand nombre de documents, l’institution concernée peut se concerter avec le demandeur de manière informelle afin de trouver un arrangement équitable.

[ Selon le guide détaillé publié en 2022 par le Médiateur européen :
Selon la jurisprudence de l’UE [14], une institution, un organe ou un organisme de l’UE peut refuser de traiter une demande d’accès du public à un très grand nombre de documents ou à des documents très volumineux si le travail nécessaire pour répondre à la demande entraîne une charge administrative disproportionnée. Toutefois, l’institution européenne en question doit d’abord consulter le demandeur pour tenter de trouver une "solution équitable". Il peut s’agir d’aider à réduire le nombre de documents demandés.
Il est généralement dans l’intérêt des demandeurs de contribuer à ces efforts car, selon la jurisprudence de l’UE [15], si aucune solution ne peut être trouvée, l’institution, l’organe ou l’organisme de l’UE peut refuser de traiter la demande.
Un demandeur ne peut pas contourner cette règle en faisant plusieurs demandes distinctes au cours de la même période.
Le Médiateur a constaté qu’une institution, un organe, un organisme ou une agence de l’UE devrait aider un demandeur à restreindre sa demande en lui fournissant une liste des documents en sa possession.
Certaines agences peuvent, au lieu de refuser des demandes multiples, utiliser un système de file d’attente. Dans ce cas, elles traiteront les demandes dans l’ordre. ]

4. Les institutions assistent et informent les citoyens quant aux modalités de dépôt des demandes d’accès aux documents.

Article 7 Traitement des demandes initiales

1. Les demandes d’accès aux documents sont traitées avec promptitude [ cela n’a rien d’une obligation juridiquement contraignante. Voir infra ]. Un accusé de réception est envoyé au demandeur. Dans un délai de quinze jours ouvrables à partir de l’enregistrement de la demande, l’institution soit octroie l’accès au document demandé et le fournit dans le même délai conformément à l’article 10, soit communique au demandeur, dans une réponse écrite, les motifs de son refus total ou partiel et l’informe de son droit de présenter une demande confirmative conformément au paragraphe 2 du présent article.

2. En cas de refus total ou partiel, le demandeur peut adresser, dans un délai de quinze jours ouvrables suivant la réception de la réponse de l’institution, une demande confirmative tendant à ce que celle-ci révise sa position.

3. À titre exceptionnel, par exemple lorsque la demande porte sur un document très long ou sur un très grand nombre de documents, le délai prévu au paragraphe 1 peut, moyennant information préalable du demandeur et motivation circonstanciée, être prolongé de quinze jours ouvrables.

4. L’absence de réponse de l’institution dans le délai requis habilite le demandeur à présenter une demande confirmative [ sous-entendu : rien n’oblige vraiment l’institution à vous répondre dans le délai initial de 15 jours. Après 15 jours sans réponse, si vous êtes têtu, faites une demande confirmative (art. 8 ci-dessous), c’est-à-dire : réitérez votre demande, en rappelant votre demande initiale ].

Article 8 Traitement des demandes confirmatives

1. [ et c’est reparti pour un tour comme supra (art. 7) ... ] Les demandes confirmatives sont traitées avec promptitude. Dans un délai de quinze jours ouvrables à partir de l’enregistrement de la demande, l’institution soit octroie l’accès au document demandé et le fournit dans le même délai conformément à l’article 10, soit communique, dans une réponse écrite, les motifs de son refus total ou partiel. Si elle refuse totalement ou partiellement l’accès, l’institution informe le demandeur des voies de recours dont il dispose, à savoir former un recours juridictionnel contre l’institution [ conseil : vu le délai et le coût, en pratique, on évitera cette voie ] et/ou présenter une plainte au Médiateur européen [ moins cher, plus simple et plus rapide ... ], selon les conditions prévues respectivement aux articles 230 et 195 du traité CE.

2. A titre exceptionnel, par exemple lorsque la demande porte sur un document très long ou sur un très grand nombre de documents, le délai prévu au paragraphe 1 peut, moyennant information préalable du demandeur et motivation circonstanciée, être prolongé de quinze jours ouvrables.

3. L’absence de réponse de l’institution dans le délai requis est considérée comme une réponse négative, et habilite le demandeur à former un recours juridictionnel contre l’institution et/ou à présenter une plainte au médiateur, selon les dispositions pertinentes du traité CE.
[ On voit bien, là, que rien n’oblige vraiment l’institution à satisfaire votre demande dans le second délai de 15 jours. Au final : au bout de deux demandes identiques et d’un mois (15 jours + 15 jours) sans réponse satisfaisante — ce qui en pratique n’est heureusement pas le cas le plus fréquent —, vous pouvez soit renoncer, soit attendre nettement plus longtemps les documents recherchés, soit attaquer la décision de refus implicite. ]

Article 9 Traitement des documents sensibles

1. Les documents sensibles sont des documents émanant des institutions ou des agences créées par elles, des États membres, de pays tiers ou d’organisations internationales, classifiés "TRES SECRET/TOP SECRET", "SECRET" ou "CONFIDENTIEL" en vertu des règles en vigueur au sein de l’institution concernée protégeant les intérêts fondamentaux de l’Union européenne ou d’un ou plusieurs de ses Etats membres dans les domaines définis à l’article 4, paragraphe 1, point a), en particulier la sécurité publique, la défense et les questions militaires.

2. Dans le cadre des procédures prévues aux articles 7 et 8, les demandes d’accès à des documents sensibles sont traitées exclusivement par les personnes autorisées à prendre connaissance du contenu de ces documents. Sans préjudice de l’article 11, paragraphe 2, il appartient à ces personnes de préciser les références pouvant figurer dans le registre public concernant ces documents sensibles.

3. Les documents sensibles ne sont inscrits au registre ou délivrés que moyennant l’accord de l’autorité d’origine.
[ Autrement dit : la plupart des documents militaires et des services d’espionnage et de contre-espionnage n’ont quasiment aucune chance de pouvoir être obtenus. ]

4. Toute décision d’une institution refusant l’accès à un document sensible est fondée sur des motifs ne portant pas atteinte aux intérêts dont la protection est prévue à l’article 4.

5. Les Etats membres prennent les mesures appropriées en vue d’assurer, dans le cadre du traitement des demandes de documents sensibles, le respect des principes énoncés dans le présent article et à l’article 4.

6. Les règles prévues au sein des institutions concernant les documents sensibles sont rendues publiques.

7. [...]

Article 10 Accès à la suite d’une demande

1. L’accès aux documents s’exerce soit par consultation sur place, soit par délivrance d’une copie, y compris, le cas échéant, une copie électronique, selon la préférence du demandeur. Le coût de la réalisation et de l’envoi des copies peut être mis à la charge du demandeur. Il ne peut excéder le coût réel de la réalisation et de l’envoi des copies. La gratuité est de règle en cas de consultation sur place ou lorsque le nombre de copies n’excède pas 20 pages A4, ainsi qu’en cas d’accès direct sous forme électronique ou par le registre.
[ Autrement dit : lorsque le document demandé n’est pas disponible au format numérique, sa reproduction et son envoi peuvent parfaitement être payants, sans pouvoir pour autant excéder les coûts réels ]

2. Si un document a déjà été divulgué par l’institution concernée et est aisément accessible pour le demandeur, l’institution peut satisfaire à son obligation d’octroyer l’accès aux documents en informant le demandeur des moyens d’obtenir le document souhaité [ et non, comme souligné plus haut, en le fournissant elle-même directement ].

3. Les documents sont fournis dans une version et sous une forme existantes (y compris électroniquement ou sous une autre forme : écriture braille, gros caractères ou enregistrement), en tenant pleinement compte de la préférence du demandeur.

Une réforme improbable du règlement 1049/2001

L’application du Traité de Lisbonne signé le 13 décembre 2007 (TFUE) impose la modification de ce règlement. L’article 10 alinéa 3 du traité de Lisbonne pose en effet le principe suivant : « Tout citoyen a le droit de participer à la vie démocratique de l’Union. Les décisions sont prises aussi ouvertement et aussi près que possible des citoyens ». Surtout, l’article 15 alinéa 3 du TFUE, plus concrètement, énonce :

« Tout citoyen de l’Union et toute personne physique ou morale résidant ou ayant son siège statutaire dans un État membre a un droit d’accès aux documents des institutions, organes et organismes de l’Union, quel que soit leur support, sous réserve des principes et des conditions qui seront fixés conformément au présent paragraphe.
Les principes généraux et les limites qui, pour des raisons d’intérêt public ou privé, régissent l’exercice de ce droit d’accès aux documents sont fixés par voie de règlements par le Parlement européen et le Conseil, statuant conformément à la procédure législative ordinaire.
Chaque institution, organe ou organisme assure la transparence de ses travaux et élabore dans son règlement intérieur des dispositions particulières concernant l’accès à ses documents, en conformité avec les règlements visés au deuxième alinéa.
La Cour de justice de l’Union européenne, la Banque centrale européenne et la Banque européenne d’investissement ne sont soumises au présent paragraphe que lorsqu’elles exercent des fonctions administratives.
Le Parlement européen et le Conseil assurent la publicité des documents relatifs aux procédures législatives dans les conditions prévues par les règlements visés au deuxième alinéa. »

Pour transposer ce principe de manière concrète, la Commission a proposé une révision du règlement le 30 avril 2008 [16]. Le Parlement européen a rejeté cette proposition en mai 2009, par 439 voix pour, 200 contre et 57 abstentions. La proposition prévoyait d’étendre les exceptions au droit d’accès. Les députés estimaient que cette proposition restreignait la liberté d’accès acquise en 2001, et n’était qu’un retour en arrière [17].

La procédure législative a été de facto abandonnée en 2011. Le texte n’a jamais fait l’objet d’un accord complet entre le Parlement et la Commission et n’a jamais eté examiné par le Conseil [18].

Emmanuel Barthe
documentaliste juridique

Pour aller plus loin - Bibliographie

Tous ces documents sont disponibles gratuitement en ligne.

 Le Médiateur européen (European Ombudsman) propose :

 Le droit d’accès aux documents des institutions européennes, par Marc Maes, chef adjoint de l’unité "Transparence, relations avec les groupes d’intérêt et les organisations extérieures", Commission européenne - Secrétariat général, Cahiers de la documentation [Belgique], 2010/4, PDF, 12 p.

 Ouverture, transparence et accès aux documents et à l’information dans l’Union européenne, par Henri Labayle, professeur à l’Université de Pau et des pays de l’Adour, 2013, PDF, 44 p. Note demandée par la Commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures du Parlement européen.

 Droit d’accès aux élements d’une demande d’autorisation de muise sur le marché des médicaments, par Dominique Aguilar, docteur en droit et juriste, EuroGers Information, 2020.

 CJUE : droit d’accès aux documents des institutions de l’Union, Gazette du Palais, 2 juillet 2012.

 Possibilité pour la Commission européenne de donner accès aux mémoires des États membres de l’Union européenne liés à une procédure juridictionnelle devant la CJUE, La Lettre de la DAJ, n° 235, 7 septembre 2017.

 La révision du règlement (CE) n° 1049/2001 relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission, par Maes Marc, in La Gazette des archives, n° 215, 2009-3. Archives et coopération européenne : enjeux, projets et perspectives et Les données personnelles, entre fichiers nominatifs et jungle Internet. pp. 53-56.

Notes

[1JOUE L 145 du 31 mai 2001, pp. 43–48.

[2A l’origine du règlement Transparence, il était recommandé de s’adresser à l’"information officer" de la DG concernée. Mais les "information officers" sont de plus en plus difficiles à trouver. Il vaut donc mieux laisser tomber. Il n’empêche qu’il reste utile, pour vos recherches, de déterminer la DG concernée.

[3Par exemple, le cas où la Commission doit demander l’accord d’autres organismes, comme les Etats membres, car ils sont les auteurs initiaux des documents demandés.

[4L’exposé des motifs de la dernière proposition de texte de la Commission dans ce dossier — proposition considérablement raccourcie et expurgée de la presque totalité du projet original (COM/2011/0137 final du 21 mars 2011) et jamais adoptée — précise utilement le champ d’application du règlement Transparence :

« Bien que, en pratique, la plupart des institutions, organes et organismes de l’Union européenne appliquent le règlement 1049/2001 ou des règles similaires sur une base volontaire, il existe en vertu du traité une obligation légale d’étendre le droit d’accès à l’ensemble de ces institutions, organes et organismes [ notez ici les termes « organes et organismes » : le règlement 1049/2001 n’envisage, lui, que les seules « institutions » ].
Dans la mesure où la plupart des institutions, organes et organismes de l’Union appliquent le règlement ou des règles similaires, le champ d’application institutionnel du règlement actuellement en vigueur peut être étendu à l’ensemble de ces institutions, organes et organismes, sous réserve des limitations prévues par le traité en ce qui concerne la Cour de justice, la Banque centrale européenne et la Banque européenne d’investissement.
La Commission considère, dès lors, que le règlement 1049/2001 devrait être modifié sans délai en vue d’étendre son champ d’application institutionnel en conformité avec la nouvelle base juridique de l’accès aux documents que constitue l’article 15, paragraphe 3, du TFUE. Cette modification ne préjuge en rien la procédure en cours visant à une refonte du règlement 1049/2001 sur la base de la proposition de la Commission d’avril 2008. »


En clair : la Commission, son projet de modification de fond du règlement 1049/2001 ayant été retoqué par le Parlement, propose désormais seulement d’élargir officiellement le champ d’application à l’ensemble des structures de l’UE. Pour le reste, la réforme de fond semble bloquée du fait des « fortes divergences de vues » (expression employée par l’exposé des motifs de la dernière proposition de texte de la Commission) entre le Parlement d’une part et le Conseil et la Commission d’autre part.

[5Decision of the European Ombudsman in the joint inquiry in cases 1500/2019/TM and 1600/2019/TM concerning Frontex’s practice to require an official identification document from applicants for public access to its documents, 11 September 2019.

[7Decision of the European Ombudsman in case 2134/2018/FP on the European Commission’s refusal to give public access to briefing material used by its President in a meeting with the President of the United States
DECISION, 15 October 2019.

[9The European Commission’s refusal of public access to text messages exchanged between the Commission President and the CEO of a pharmaceutical company on the purchase of a COVID-19 vaccine, CASE 1316/2021/MIG - OPENED ON Thursday 16 September 2021 - RECOMMENDATION ON Wednesday | 26 January 2022 - DECISION ON Tuesday 12 July 2022.

[10Decision of the European Ombudsman in case 1782/2019/EWM on the refusal of the European Commission to make public records of payments made to farmers under the Common Agricultural Policy, 1st October 2019.

[11Decision of the European Ombudsman in case 739/2016/JAP concerning the European Union Intellectual Property Office’s refusal to grant access to a downloadable version of its case law database, 27 June 2016.

[12Textes européens : obligation de communication des documents concernant les trilogues en cours, Lettre de la DAJ, n° 249, 5 avril 2018. TPUE, 7e chambre, 22 mars 2018, affaire T-540/15 De Capitani.

[13Voir aussi la présentation de la décision par le Journal du marché intérieur. Extraits pertinents du communiqué de presse : « Le Tribunal rappelle que la possibilité de ne pas procéder à un examen du contenu des documents demandés est admise seulement s’il est manifeste que l’exception invoquée s’applique à l’intégralité de leur contenu. Le Tribunal reconnaît, à cet égard, que les parties ont le droit de défendre leurs intérêts indépendamment de toute influence extérieure et que la garantie d’un échange d’informations et d’opinions, libre de toute influence extérieure peut exiger, dans l’intérêt de la bonne marche de la justice, de soustraire de l’accès du public les mémoires des institutions, aussi longtemps que leur contenu n’a pas fait l’objet d’un débat devant le juge. Le Tribunal conclut donc que, dès lors que la procédure juridictionnelle concerne une affaire pour laquelle l’audience n’a pas encore eu lieu, la Commission peut refuser de divulguer ses mémoires sans procéder à un examen concret de leur contenu.
En revanche, après la tenue de l’audience, la Commission a l’obligation de procéder à une appréciation concrète de chaque document sollicité pour vérifier, eu égard à son contenu, s’il peut être divulgué ou si sa divulgation porterait atteinte à la procédure juridictionnelle à laquelle il se réfère. »

[16COM(2008) 229 final, n° de procédure 2008/0090 (COD).