E-justice/RPVA : un pas est franchi
Le système e-barreau s’impose dans les cabinets d’avocats
Après les barreaux de province, celui de Paris se rapproche de l’inévitable : la communication de nombreux actes de procédures (pas tous, pas encore) aux tribunaux de grande instance (TGI) par une interface en ligne sécurisée, appelée ici e-barreau.
Passer par e-barreau est en effet désormais obligatoire pour les référés devant le TGI de Paris. Bobigny devrait suivre en 2010. Pour l’appel, officiellement, ce sera obligatoire à partir du 1er janvier 2010 [Pour l’appel par voie électronique obligatoire, ce sera finalement le 1er janvier 2011 31 mars 2011 1er septembre 2011 et non pas le 1er janvier 2010.]. Pas (plus) le choix.
Inévitable parce que faisant gagner du temps aux avocats, clairement. Inévitable aussi par la volonté d’économies du ministère de la Justice. Pour citer la page sur le Réseau privé virtuel Avocats (RPVA) de Me Heftman, avocat à Paris :
« La raison d’être du RPVA [NB : autre nom de e-barreau] est définie par la convention CNB - Ministère de la justice : " Le recours à l’ensemble de ces nouvelles technologies doit engendrer un gain de temps, une diminution des déplacements, une accélération de la transmission des informations, et une meilleure gestion des affaires au bénéfice du justiciable. " »
Ce qui ne l’empêche pas d’être peu pratique pour les grandes structures puisque la clé USB est personnelle et unique. Pour être en théorie plus sécurisée (clé cryptographique personnelle + mot de passe à 6 caractères), cette solution n’est pas une solution de travail en réseau ni une vraie solution Internet pratique comme l’est en revanche Sagace pour les juridictions administratives.
D’autres critiques existent : voir le topo très complet de Patrick Heftman ou les reproches de Nicolas Creisson fin 2007. Et mi-2008 bien des avocats hésitaient. Elles ne changeront toutefois plus grand’ chose maintenant : le rouleau compresseur est en marche et l’adoption du système aussi. Les avocats ne sont plus dans l’attentisme qui dominait en 2008.
Message aux avocats : attention, e-barreau va entraîner quelques petits changements d’habitude :
- le certificat électronique vaut signature électronique de l’avocat. Attention aux "identity theft" éventuels si vous égarez votre clé. Déclarer la perte et la faire refaire immédiatement
- dès qu’un avocat retire son certificat cryptographique — sa clé USB concrètement — les juridictions "abonnées" à e-barreau cessent de lui adresser du papier
- les documents et messages adressés par e-barreau feront très logiquement, dès lors, courrir les délais : consultez bien vos mails (chaque arrivée d’un document donne lieu à l’envoi d’un mail sur la messagerie électronique "normale" de l’avocat)
- les TGI ne savent pas lire le format Word (.doc) : elles n’acceptent que du RTF ou du PDF. Pensez à convertir vos fichiers avant de les envoyer
- la clé USB doit être d’abord installée avant de fonctionner
- elle doit également être insérée dans l’ordinateur à chaque accès à e-barreau et y rester aussi longtemps qu’on y est connecté
- attention si c’est l’assistante qui doit "envoyer" et "réceptionner" les documents numériques : il va lui falloir la clé de l’avocat ...
- il n’est pas certain que la date du 1er janvier 2010 sera tenue pour les appels par voie électronique … En tout cas, ils seront obligatoires sous peine de rejet de l’appel
- la clé USB permet d’accéder à e-carpa pour effectuer les trois quarts des opérations de mouvements de fonds pour le compte des clients de l’avocat. Mais pour accéder à e-carpa, il faut en principe une inscription qui est indépendante de celle à e-barreau
- tribunaux de commerce (TCom) et conseils de prud’homme (CPH) sont pour l’instant hors champ. Pour les TCom, ça ne devrait pas tarder à changer.
Utilisateurs de logiciels de cabinet d’avocats, sachez que vos fournisseurs travaillent sur l’interfaçage entre votre logiciel et e-barreau : Ciceron, Helaiste et Clior (WK Solutions de gestion, ex-Lamy) et PolyOffice (LexisNexis) semblent déjà prêts.
Utilisateurs de l’ex-e-greffe, attention : les boîtes e-greffe ont disparu, avec leur contenu. Or il semble que ce contenu n’a pas été transféré dans les boîtes e-barreau ...
Le PACER/online docket à la française est donc en train de naître. Mais, contrairement à lui, il n’est pas ouvert à d’autres que les parties aux litige. Alors qu’aux Etats-Unis, les documents du "docket" sont des "public documents" ....
Plus d’infos / lecture utile :
- une présentation technique d’e-barreau (format PowerPoint) par le DSI du Conseil national des barreaux (CNB)
- Nouvelles technologies et système judiciaire - Le déploiement de la communication dans les juridictions judiciaires : Etude / Gérard Sabater, membre du CNB (Semaine juridique édition Générale n° 51, 17 décembre 2008, I 223). C’est un véritable guide juridique d’e-barreau. Il liste notamment toutes les procédures et actes concernés par la transmission électronique. Une lecture fortement recommandée
- quelques documents supplémentaires sur e-barreau sont disponibles sur le site officiel.
Emmanuel Barthe
documentaliste juridique
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