Contre la fonctionnalité "feuilletage" des revues juridiques en ligne
Les éditions Lextenso proposent depuis janvier 2019 un service (payant) de "feuilletage" électronique pour consulter toutes leurs revues (Gazette du Palais, Petites Affiches, Defrénois, Bulletin Joly Sociétés, la série L’Essentiel ...) sur deux supports :
- sur ordinateur avec le site Kiosque Lextenso
- sur tablette ou mobile, par l’application Kiosque Lextenso.
Les revues diffusées se trouvent aussi sur la Base Lextenso.
Pour un exemple de ce que ça donne, consultez gratuitement et sans codes d’accès un numéro du Bulletion Joly Sociétés.
Ce service m’a permis de repérer la création d’une nouvelle revue chez Lextenso : le Bulletin Joly Travail, dont le n° 1 remonte à septembre 2018.
Proposer un nouveau service est une initiative louable de la part de l’éditeur. Et le résultat est très élégant puisque identique au papier.
Pour autant, plusieurs de mes collègues et moi-même estimons que ces applications dites de "feuilletage" n’apportent pas grand’ chose. Et de nombreux juristes parmi nos "clients" vont dans le même sens.
Par exemple, ici, je suis obligé de cliquer trois voire quatre fois sur la loupe “+” pour grossir le texte et pouvoir le lire. Et pas de recherche dans le texte des articles, uniquement par les mots du titre de ceux-ci. Sans parler du fait qu’on a envie de demander pitié pour l’ergonomie, la praticité ... et nos yeux.
La version disponible sur Labase-Lextenso.fr (non feuilletable) nous semble bien plus pratique. Parce qu’elle nous évite tous ces redimensionnements et ces allez retours à droite puis à gauche puis en haut puis en bas. Le texte s’adapte automatiquement à la taille de l’écran et de la fenêtre.
Les fonctionnalités de Dalloz-Revues n’emballent pas non plus les utilisateurs. Exemple infra avec une double page de l’AJDA affichée sur grand écran et non grossie.
Pourquoi si peu de revues juridiques en PDF — à part chez Lamy [1] et, depuis quelques années, chez LexisNexis ? On en revient (presque) toujours au même argument : la crainte des éditeurs de voir leurs PDF circuler sous le manteau. L’argument est usé :
- déjà, il est possible — et depuis très longtemps — de mettre des protections techniques (DRMs, watermark) sur des fichiers PDF [2]
- et aujourd’hui, ce qu’on veut, c’est moins lire un document unique que chercher et trouver facilement plusieurs documents. Télécharger et envoyer par mail un PDF, c’est moins bien et c’est plus long
- enfin, si LexisNexis, connu pour son attention aux choses de la propriété intellectuelle, s’est lancé, de toute évidence, dans un programme de mise en ligne progressive de ses revues en fac-similé PDF du papier, l’argument ne tient plus.
Ce qui est réellement utile et réellement demandé par les juristes, c’est soit du HTML soit du PDF (pour imprimer proprement), soit du ePub parce que c’est un format adapté aux petits écrans et qui se charge très vite. Et, très sincèrement, rien d’autre.
Et vous, vous en pensez quoi ?
Emmanuel Barthe
juriste documentaliste, veilleur
Notes
[1] Voir notre billet La fin du Flash nous offrira t-elle enfin les revues PDF réclamées depuis des années ?.
[2] Voir notre billet Les éditeurs juridiques et le PDF (2005).
Commentaires
2 commentaires
Contre la fonctionnalité "feuilletage" des revues juridiques en ligne
Je suis entièrement d’accord. Nous voulons une lecture aisée et confortable, un affichage rapide et surtout une fonctionnalité de recherche simple et efficace. Merci pour ce billet on ne peut plus clair !
Contre la fonctionnalité "feuilletage" des revues juridiques en ligne
Bonjour,
1 - Vous avez tout à fait raison. Schématiquement, je pense que les flipbooks sont destinés à un public dédié pour une seule et unique utilisation et pas pour des professionnels de l’info. Ce format est d’ailleurs souvent utilisé pour des catalogues ou dans ce genre. Il est, en gros et pour moi, l’équivalent d’un showroom..
2 - Pour les professionnels de l’information, de la recherche ou de la veille, les formats html et pdf sont effectivement des références, traitables et téléchargeables, sachant qu’en plus des bases de données existantes (dalloz, lexis, etc), ils sont souvent construit leur propre base de donnée documentaire au fil des années, stockées sur leur pc, disque externe ou sur leur réseau, et dans laquelle selon leur outillage, ils vont utiliser des outils de recherche plus ou moins avancées. Et dans ce cadre, les recherches marchent mieux avec des documents correctement nommés, chrono daté, et évidemment dans des formats permettant les recherches plein texte, donc pdf et html, voire doc et docx.
3 - Effectivement, les éditeurs, depuis très longtemps, ont une peur irrépressible de la fuite de leurs documents - je ne suis plus étudiant depuis longtemps mais vous devez vous souvenir du fameux "photocopillage tue le livre" - d’autant plus, et ce point est vraiment différent d’il y a quelques années, que de nombreux rédacteurs, avocats notamment, mettent directement en ligne sur leurs propres sites, les articles qu’ils sont amenés à rédiger pour ces revues, ce qui leur permet donc de mettre en avant leurs compétences et la reconnaissance par lesdites revues, donc de faire leur promotion.
Bravo pour votre travail.
Laisser un commentaire