Le « plan de dématérialisation des procédures juridictionnelles » — Une bien longue formule pour une courte réalité (dans notre série "L’e-Administration avance lentement")
Selon la communication sur la dématérialisation des procédures juridictionnelles de la ministre de la Justice au Conseil des ministres du 13 février 2008, « au 1er janvier 2008, la première phase du plan de dématérialisation est opérationnelle » :
- « toutes les juridictions sont dotées des matériels nécessaires à la numérisation des procédures pénales, ce qui évite les tâches fastidieuses de photocopie des dossiers
- « tous les tribunaux de grande instance peuvent communiquer électroniquement avec les barreaux : les affaires civiles peuvent être suivies à distance par les avocats
- « toutes les cours d’appel disposent d’au moins une salle d’audience équipée de matériel de visioconférence. La visioconférence pourra être utilisée pour les audiences et pour certaines convocations de détenus. Tous les tribunaux de grande instance en seront équipés avant la fin du premier trimestre 2008
- « tous les avocats peuvent consulter, sur un portail d’accès, l’état d’avancement des affaires en instance devant le juge administratif. »
Sur le terrain :
- on constate souvent que les ordinateurs livrés sont dépassés
- autant la justice administrative (e-Sagace) a bien avancé, autant la justice judiciaire ... Par exemple, seule la CA de Paris et les tribunaux de Terre-neuve semblent équipés d’une véritable salle de visioconférence adaptée à celle-ci, et d’un technicien dédié. Et le « suivi à distance » dont parle la ministre n’est a priori au mieux qu’une interface donnant les dates d’audience, mise en état etc. de certains TGI dont Paris. Seule l’interconnexion entre le RPJ (Réseau privé Justice) le RPVA (celui des avocats) [1] pourrait permettre à la formule utilisée par la ministre de représenter une réalité [2]. En vérité, on est encore très loin d’un véritable greffe électronique [3], dont en revanche s’approche le Tribunal de commerce de Paris — avec des moyens d’une autre ampleur il est vrai.
La communication de la Garde des Sceaux confirme :
- son intérêt pour les "points visio-public" expérimentés avec France Télécom pour permettre aux justiciables de traiter certaines affaires à distance avec les greffes des tribunaux
- et la « poursuite de l’expérimentation des téléprocédures dans le domaine du contentieux administratif (dépôt des requêtes, échange des mémoires, envoi des avis d’audience...), engagée au Conseil d’Etat en matière fiscale en 2005 et étendue en 2007 à la cour administrative d’appel et au tribunal administratif de Paris. Ce dispositif devrait être généralisé dans l’ensemble des juridictions administratives entre 2009 et 2010. »
Entre les lignes de cette communication et en allant sur le terrain, on voit que ce qui avance vraiment, c’est la mumérisation et la visioconférence au pénal, et les téléprocédures au contentieux administratif. Et que même là, aucun "plan" n’est terminé.
Notes
[1] Lire notre brève L’e-administration avance lentement (suite) — Numérisation des procédures civile et pénale : le point de vue plus réaliste des avocats.
[2] A moins que ... Peut-être, dans la nuit, les deux réseaux se sont-ils interconnectés tout seuls — je ne savais pas que c’était aussi avancé :-)
[3] Lire notre article French cases : researching docket sheets and full text— uniquement disponible en anglais.