Des thésaurus juridiques de valeur, sur le Web
La question revient peu souvent, mais régulièrement, sur les listes de documentation : où trouver des thésaurus juridiques en français ? Il y a plusieurs années ma réponse était : prenez comme point de départ la Table de la Gazette du Palais ou l’index matière d’une grande revue juridique.
Ces suggestions restent valables. Mais Internet et quelques sites web ont nettement amélioré l’offre. Je voudrais signaler ici deux thésaurus juridiques de qualité, qui peuvent avantageusement servir pour bâtir votre propre outil, notamment en droit des affaires francophone :
- un thésaurus juridique belge, appelé un peu abusivement "Thésaurus universel" (TU) et qui a malheureusement disparu du Web (l’ouvrage papier peut encore se trouver)
http://www.thesaurusuniversel.be - le thésaurus du Tribunal fédéral suisse, Jurivoc
http://www.bger.ch/fr/index/juridiction/jurisdiction-inherit-template/jurisdiction-jurivoc-home.htm
Il est consultable en faisant une recherche par terme et téléchargeable en un seul fichier au format ZIP.
Stéphane Cottin, sur son blog ServiceDoc.info conseille pour sa part, en plus des deux thésaurus cités supra :
- l’extrait de la liste Rameau utilisé par la Bibliothèque Cujas [1]
- pour le seul droit public, la liste Ariane utilisée par les juridictions administratives
- pour le droit communautaire, EUROVOC http://europa.eu/eurovoc/ et sa rubrique 12 Droit. Attention : EUROVOC est multilingue, mais, comme le fait remarquer Stéphane, il ne permet pas une indexation fine en droit. J’ajoute que si, en droit pénal, droit civil et libertés publiques et droits de l’Homme, il est correct, il a une curieuse conception du droit international privé (DIP). Et il est peu pratique pour le droit des affaires, puisque les termes en ce domaine sont peu nombreux et dispersés/mélangés avec des termes non juridiques sous les rubriques 16 Vie économique [2], 20 Echanges économiques et commerciaux, 24 Finances, 4426 Relation et droit du travail, etc.
En partie juridique seulement, à signaler : le Thésaurus Audit Comptabilité (communiqué PDF) de la Compagnie Nationale des Commissaire aux Comptes (CNCC) a mis gratuitement à disposition en 2012 avec 12 rubriques, 5700 mots, relations synonymiques, hiérarchiques, associatives....
Partiellement juridiques seulement, pas vraiment calqués sur le droit français, mais pouvant servir d’aide à la construction d’un langage documentaire juridique en français dans le domaine du droit social, deux thésaurus développés par des organismes dépendants de l’Organisation internationale du travail (OIT) :
- le thésaurus de la sécurité et de santé au travail (CISTHES) du Centre international d’informations de sécurité et de santé au travail (CIS)
http://www.ilo.org/dyn/cisdoc/cisthes_search.ilostart?p_lang=F - le thésaurus de la Bibliothèque du Bureau international du travail (BIT)
http://www.ilo.org/public/libdoc/ILO-Thesaurus/french/
A éviter à mon avis : le thésaurus du Global Legal Information Network (GLIN). Il n’est pas du tout adapté au droit français, la France n’y participe d’ailleurs pas. C’est en fait un thésaurus juridique d’inspiration anglo-saxonne destiné à indexer de manière identique des droits différents. Or, qui trop embrasse, mal étreint ... [3].
Pour se tenir à jour, voir, sur l’annuaire DMOZ, la rubrique Thésaurus [4], tenue par Sylvie Dalbin [5].
Notes
[1] Bibliothèque spécialisée en droit et sciences économiques, Cujas est, avec la Bibliothèque nationale de France (BNF) et la Bibliothèque du Congrès américain (Congress Library), la plus importante bibliothèque de droit français.
[2] Par exemple, les aides d’Etat, qui en droit ressortissent du droit de la concurrence, sont classées chez EUROVOC en
1606 Politique économique et non en 4031 Concurrence.
[3] Il suffit de considérer que les deux systèmes juridiques anglo-saxon (common law) et français (droit latin écrit) sont assez différents, ce qui devrait entraîner en théorie des versions linguistiques du thésaurus très différentes ou au moins — restons réalistes ... — un avertissement sur le fait que le thésaurus du GLIN est traduit dans plusieurs langues, mais qu’il est d’abord (c’est la réalité que je vois) un thésaurus juridique d’inspiration anglo-saxonne destiné à indexer de manière identique des droits différents. Pourtant, le thésaurus du GLIN présente toutes les versions linguistiques de son thésaurus de la même façon, en traduisant juste les termes. Exemple avec le terme faillite dans la version en français : en droit français, le droit de la faillite, à part le surendettement des particuliers, n’a rien à faire avec le Code civil, uniquement avec le Code de commerce. Et on ne parle pas de fidéicommis et de curateurs, sauf pour les particuliers (et encore, puisque la faillite est un terme de droit commercial), mais d’administrateurs, de mandataires judiciaires et — nouveauté — de représentants de la masse des créanciers. Je pourrais multiplier les exemples.
Au delà du juridique, sur le strict plan des règles de construction d’un thésaurus, pourquoi donc le thésaurus du GLIN utilise t’il la forme plurielle pour de nombreux descripteurs (exemple : "sociétés anonymes" au lieu de "société anonyme") et pas pour d’autres ? Puisqu’on est sur la SA, la structuration, du moins en droit français, des termes spécifiques, est une absurdité.
La comparaison avec des entrées identiques dans le thésaurus Jurivoc du Tribunal fédéral (suisse) et plus encore dans le Thésaurus Universel, fiables, eux, est édifiante pour le non-juriste : voir, par exemple, Société puis Société anonyme dans le Thésaurus Universel.
[4] Cette page de l’Open Directory est souvent difficile à charger. Aussi, voici le chemin pour vous y rendre à partir de la page d’accueil : DMOZ > World > Français > Références > Thésaurus.